Pour faire de la série policière aujourd’hui, il faut savoir se démarquer. Trouver un concept original et fédérateur. Ou alors, créer un assemblage de diverses influences, en espérant que la colle prenne. Noah Hawley (scénariste sur Bones) et The Unusuals ont penché pour la seconde solution.
Au départ, il y a une jeune policière des mœurs, venue infiltrer, sur la demande de son capitaine, une brigade pour y dénicher les secrets inavouables, après la mort d’un des inspecteurs. Ce point de départ (potentiel solide, bien que déjà vu), est vite relégué aux oubliettes. Passé les trois premiers épisodes, on n’en entendra plus parler. Le show se transforme en formula cop chorale, dont l’unique particularité, sera de présenter des policiers « insolites ».
Au menu, on trouve Casey Shraeger (Amber Tamblyn, vue dans Joan of Arcadia), jeune héritière d’une grande famille new-yorkaise, préférant effectuer un vrai métier chez les gens d’en bas (et à qui on (ne) demandera (pas) d’enquêter sur ses nouveaux collègues), son partenaire, Jason Walsh (Jeremy Renner), prototype du flic parfait, jouant parfois hors-jeu pour aider ses coéquipiers. Le reste de la brigade se compose de Leo Banks (Harold Perrineau, Lost, Oz), paranoïaque persuadé qu’une malédiction familiale pèse sur lui et qu’il mourra l’année de ses 42 ans ; Eric Delahoy (Adam Goldberg, Entourage, Joey), qui vient d’apprendre qu’il souffre d’une tumeur au cerveau et se découvre une sorte de deathwish ; Eddie Alvarez (Kai Lennox), star micro-locale, s’exprimant comme Alain Delon et risée de tout le commissariat ; Henry Cole (Joshua Close), ancien braqueur reconverti en flic bigot ; Allison Beaumont (Monique Gabriela Curnen) la touche hispanique du show (les quotas, certainement) et le capitaine de la brigade Harvey Brown (Terry Kinney, Oz), la figure tutélaire à la fois autoritaire et paternaliste.
Ce qui ressemble à un casting d’une real-tv constitue le fond de commerce d’un show qui ne sait pas quel ton appliquer. Farce et drame, sans couper la poire en deux. Cohabitation difficile, qui entraîne une forme d’annulation des orientations prises. On découvre, fouine, des situations initiales intéressantes, mais noyées dans un traitement lourdaud. Et plus la série avance, plus les brèves satisfactions se transforment en frustration. A ce titre, l’histoire de Delahoy est exemplaire : on aurait pu bâtir une série autour de ce seul personnage et son interprète (Goldberg est formidable en Droopy dépressif). Relégué en arrière plan, les incursions existentielles de ce flic malade deviennent une sorte de caution dramatique censé contre-appuyer le versant humoristique de son partenaire (Banks). Et même ce dernier, dont l’application surréaliste finit par fatiguer, devient le temps d’un épisode (hommage à Fenêtre sur court d’Hitchcock) émouvant.
Juger une série sur son générique, comme un livre sur sa couverture… Dans le cas de The Unusuals, c’est pourtant un sérieux indice. Volontairement old school, le thème (composé par Hawley himself) se conclut par quelques notes de clavier Bontempi. Ringard, désuet et moche. Sans qualifier le show de ce trio peu flatteur, il incarne quelque part, l’idée que l’on peut se faire après vision de cette première et unique saison. Des intrigues policières sans intérêts, des personnages qui nagent dans ce contexte guère reluisant. Et si l’on remarque et admet un réel savoir faire professionnel, la qualité est absente du tableau final.
Absence de showrunning et intrigues éventées sont les stigmates d’une série qui n’avait déjà pas grand-chose à dire et qui s’est affichée comme une girouette. Drôle ou dramatique selon la direction du vent. Son annulation après une courte saison de dix épisodes ne surprendra personne. La télé, son univers impitoyable, n’est plus clémente à l’égard de ces shows qui ne transforment pas l’essai rapidement. Et dans le cas de The Unusuals, on ne pourra pas dire que la décision est injuste.
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