Sweet Dream

Sweet Dream

Avec Sweet Dream, Canal + et sa Nouvelle Trilogie (saison 04) tentent de surfer sur les vagues successives de l’anglaise Skins et l’américaine Gossip Girls. Envie de cerner une jeunesse réaliste. Brute et sans embellie. Confronter les classes (aisées contre populaires), les valeurs (rangées contre dévergondées), les générations (parents contre enfants). Avec un soupçon de travestissement bitchy que l’on retrouve chez la petite américaine.

Capucine, lolita de son lycée, reçoit les photos de son dernier ébat avec deux garçons. Arroseur arrosé comme elle n’est pas la dernière à vanter ses histoires de cul, toujours plus extravagantes et chargées de notation diverses sur ses amants. On retrouve à la fois la jeunesse débridée et irresponsable de Skins et l’aspect technologico-corbeau de Gossip Girls.

Le format (3×26 min) joue en défaveur de la série. Au lieu de prendre le pouls de cette jeunesse, s’élabore un vrai récit fermé. Avec point de départ et résolution, et quelques éléments annexes afin de structurer les personnages. Schéma classique et durée imposée cintre et plaque le show dans les limites du terrain trop balisé des séries françaises. Regret d’autant plus frustrant que les auteurs (Gaëlle Royer & Jean-Philippe Amar) sont parvenus à créer une galerie de personnages épais aux relations complexes (à l’échelle teenage). Et abordent des problèmes actuels de l’adolescence.

La jeunesse de Sweet Dream comble ou compense ses troubles par un substitut souvent (auto)destructeur. Capucine règle les problèmes relationnels avec son père et sa nouvelle (jeune) belle-mère par une surexposition permanente, Enzo trouve dans la junk food un refuge face à une mère idéalisant les conquêtes sans avenir. Tout comme dans la série anglaise, les auteurs dressent un portrait peu flatteur de l’autorité parentale. Tout en démission et œillères. Julien, livré à lui-même, communique avec sa mère par messages vocaux interposés et coup de vent dans la chambre d’hôpital de son frère ainé. Ses monologues agissent comme une auto-psychanalyse du pauvre, nécessaires devant les problèmes qui s’accumulent devant lui.

L’enjeu (naïf) de la série, outre celui de découvrir le corbeau, sera de mettre en collision des univers opposés et indifférents. Comment le petit gros pourra trouver grâce auprès de la queen du bahut ? Ou le jeune introspectif s’épanouira au contact d’autres ? Que l’on peut traduire par : comment sauver l’adolescence à coup de bons sentiments ? Dans ce grand bain de déchéances multiples, tout le monde ne sera pas sauvé. Certains résisteront au salut pour la sainte trinité sex, drugs «& rock’n roll.

Tentative louable et partiellement réussie. Sweet Dream manque de fédérer par sa trop courte durée. Dans ce foisonnement, explosions ponctuelles de micro-dramas, on subit l’aspect décousu. Pris entre la volonté de croquer l’adolescence actuelle et conclure une pseudo-enquête. A ce petit jeu, l’effet se retourne souvent contre ses auteurs. Et Sweet Dream souscrit à la règle : la résolution et révélation du corbeau est livrée sans envie. Balancée entre deux scènes, à la va-vite, pour un mystère qui n’en était déjà pas vraiment un. Par extension, toutes les scènes à suspense tombent à plat, victimes d’une insuffisante valorisation et une place qui vient à manquer. Le spectre de la durée qui vient hanter ses dernières considérations. La série aurait gagné à s’étaler sur une dizaine d’épisodes pour bien faire.

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