Après un Souvenir qui ressoudait des liens charnels entre Betty et Don, on pensait leur couple réparé. Il semblerait que ce n’était qu’une étape, vers une fin qui s’annonce, de plus en plus, prévisible.
Deux formes d’adultères pour deux époques. L’acte physique pour Don, l’idylle écrite pour Betty. Encore une fois, les scénaristes inscrivent dans les actes la psychologie des personnages. Ce qui constitue leur richesse, leur cohérence, l’incroyable sensation d’être vrai. Croire qu’en ouvrant un ouvrage historique ou une biographie d’époque, on pourrait retrouver leur description ou leur photo. Cette troisième saison s’inscrit dans un tournant des Etats-Unis. Où plusieurs idéologies se percutent. Où des révolutions semblent en marche. A la radio, on entend le discours du révérend Martin Luther King. « I had a dream… ». Fascination que l’on retrouve chez l’institutrice. Autre incarnation de femme moderne. Celle qui décidera de lire ce discours à la rentrée des classes. Parce que les enfants ont déjà compris, qu’un vent de changement commence à souffler. Ce personnage, qui fait tourner la tête de Don, devient une lucarne vers l’avenir. On l’imagine militante pour l’égalité entre Blancs et Noirs, hommes et femmes. Une femme indépendante et activiste. Et le fait de la trouver à une place de maîtresse n’est pas innocent.
Autre inspiration en avance sur son temps, Salvatore et l’homosexualité. Quand celui-ci s’invite au travail. L’homme, au prise avec sa conscience (il est marié, l’époque rejette l’homosexualité), fera front avec sa moral quand il ne répond pas aux avances explicites d’un client. Préservation personnelle, conscience intact le mènera à une situation difficile aux conséquences encore indéfinies. Ici, le rapport dominant/dominé, que l’on retrouve habituellement entre hommes et femmes, se teinte d’une troublante cruauté. Et vient à rendre la situation du pauvre homme encore plus intenable.
Mouvement rythmique de l’épisode : les appels nocturnes de Connie Hilton. La relation entre ce dernier et Don évolue de manière intéressante. Si elle avait débuté sur un pied égal, l’embauche du publicitaire (et la création de son contrat) l’avait conduit vers un énième rapport client/employé (plus ou moins privilégié). Mais cet épisode va approfondir et lier les personnages. Dans un échange très bien écrit (et interprété), Connie Hilton ira jusqu’à voir en Don, son fils caché. Et l’on sait combien cette déclaration peut signifier pour le personnage orphelin. Hilton incarne à la fois une figure autoritaire (« I said I want the moon… ») et protectrice (malgré sa dimension péjorative, le contrat signé). Source d’admiration (son succès professionnel, son apparente liberté d’action), modèle et rival (la campagne de publicité).
Wee Small Hour parle d’une époque en mouvement, des mentalités qui se diluent et s’extirpent de vieux schémas réducteurs. Mené par des personnalités iconiques (M. L. King), perpétré (pas toujours en le sachant) par des gens « sans importances ». Peggy, Miss Farrel, Salvatore (Don s’inscrit hors du temps) incarnent ce mouvement. Electrons encore trop individuels pour compter. Mais Mad Men n’a jamais eu la volonté de montrer la révolution, seulement celui de chroniquer ces changements à titre particulier, au cas par cas. Voir la progression (ou son absence) dans chaque individu. Car dans la série, la somme des parties est plus intéressante que son ensemble.
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