Treme 01×03 : Right Place, Wrong Time

Treme 01×03 : Right Place, Wrong Time

La dernière séquence résume bien l’épisode. Et la série jusqu’à présent. Célébration d’un mort, du passé et de la culture, pervertie par l’arrivée d’un bus. Le tour Katrina, comme il est nommé. Exploitation commerciale de la tragédie, quand, derrière les vitres du véhicule, peut-on apercevoir les flashs crépiter. Comme un zoo à ciel ouvert, où les autochtones ont remplacé les animaux. Ici, les silences sont plus éloquents que les quelques mots échangés entre Albert et le chauffeur du bus. L’incompréhension, la surprise, de voir s’exercer les plus bas instincts du capitalisme et le voyeurisme de ses figurants. La gêne et la colère réparties entre les acteurs du drame. Le bus s’éloignera après les excuses du conducteur. Resteront sur la chaussée, le groupe de musiciens et amis du défunt, forcés au silence face à l’obscénité du monde réel.

Cette dernière illustration restera le point paroxystique d’un épisode construit autour de ce motif. La Nouvelle Orléans contre le reste de l’Amérique. Un thème déjà apprécié dans le précédent, développé ici dans plusieurs situations, pour un résultat plus éloquent et contrasté. Mise en opposition des natifs (symboliques ou non), protecteurs du passé et de sa culture contre les autres, les exploitants, les envahisseurs, les ignorants. Attitude parfois justifiée, d’autres entachés d’une forme d’élitisme fanatique, d’égocentrisme culturel ou de fierté nationaliste. Dommage collatéral des villes ou régions à l’identité forte : son hermétisme. C’est ainsi que l’on reprochera à l’autre, sa présence, comme une anomalie dans un paysage qu’il ne perçoit pas à sa juste valeur ou qu’il dénature en ne répondant pas aux critères culturels.

Autre éléments de friction et tension traduit dans cet épisode, le rapport avec l’autorité, symbolisée par la police ou la garde nationale. La nature du climat hostile s’explique par l’ingérence de l’administration politique pendant et après la catastrophe et la transformation en simili ville fantôme. Pillage, violence sont nés sur les ruines, tout comme la colère générée par l’impuissance et la désaffection de l’aide nationale. Illustrée en deux séquences, la relation autorité/habitant oscille entre violence physique et verbale. Avec torts partagés des deux côtés. Mais ce qui se distingue, c’est la nature mitigée de la vie post-Katrina à la Nouvelle Orléans. Quand la ville tente de retrouver son rythme par une liberté insolente, nuancée par la pression, la peur des forces de l’ordre. On reste dans un traitement de surface, mais ce thème peut accoucher de pistes intéressantes à explorer.

On retrouve dans cet épisode le caractère éclaté de la narration et la frustration d’un récit manquant d’unité et qui nous échappe. Mais dans ce maelstrom, on devine un schéma. Ou une volonté de Simon d’ordonner sa ligne directrice sur le principe du chaos. Comment la vie se réorganise à la Nouvelle Orléans ? Par à coup. Pas à pas. Un travail de fourmis, parce que le labeur est immense et qu’il faudra du temps pour que la ville retrouve un visage. Et cette reconstruction entraîne deux mouvements distincts. Ceux qui tentent d’aller de l’avant et ceux qui se bornent à recréer le passé. Pour les seconds, cette position entraîne parfois l’aveuglement, pour les premiers, le sentiment de nager à contre courant avec pour seule volonté, un espoir assez faible.

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