Treme 01×01 : Do You Know What it Means

Treme 01×01 : Do You Know What it Means

Le son d’une fanfare de jazz s’élève dans les rue de la Nouvelle Orléans. Peut-être le symbole le plus éclatant d’une communauté qui n’a pas cessé de vivre après la catastrophe. « Trois mois plus tard » annonce sobrement, lettres blanches sur fond noir, et fige le temps. Trois mois après le passage de l’ouragan Katrina. La parade défile, la musique adoucie les maux. Autour, des maisons éventrées, aux toits affaissés, des carcasses de voiture, les stigmates de l’ouragan, la marque des eaux qui a ravagé la ville. Une « Man-made Catastrophe » scandera Creighton Bernette (John Goodman). Mais la musique balaie l’apitoiement. Le temps de quelques notes, rappellera les heures fastes d’une ville mythique aux sons des jazz bands.

Après The Wire et l’étude sociologique de Baltimore, David Simon explore la Nouvelle Orléans post-Katrina. Au récit policier, structurant sa série, imposant sa forme, succède la chronique. Multiplication des personnages, situations, comme autant de petites vies, capables d’illustrer ce qu’est devenue la ville. Des portraits d’habitants, de survivants constituent l’architecture de la série. Parce qu’abandonnée par les sphères dirigeantes, c’est à la population de reconstruire leurs quartiers, et reprendre leur existence. Restaurants, bars, concerts, émissions de radio, la vie tente de repartir. On puise dans ses ressources, on s’adapte pour redonner à la Nouvelle Orléans, le visage d’une splendeur passée. Mais le travail se fait dans la douleur. Précarité, insalubrité, moyens inexistants, le déterminisme des habitants est courageux, la volonté de reprendre le cours de leur vie tout aussi noble, mais la fracture reste importante et les blessures non cicatrisées. En multipliant ainsi les personnages, Simon permet d’aborder de nombreux problèmes. Délocalisation aux villes voisines (Bâton Rouge), faillite de commerces, besoins de reconstruction (distribution d’eau), la Nouvelle Orléans reste un immense chantier, voire une décharge à ciel ouvert. Mais l’auteur ne verse jamais dans le misérabilisme. A la situation parfois désespérée, les personnages assurent une conviction surhumaine qui leur permet de transcender les adversités et continuer à (sur)vivre.

On entre dans ce premier épisode comme on découvre une communauté. Par ses coutumes (la parade), ses rituels, sa musicalité (le son de la rue), par une poignée de membres immédiatement remarquables. David Simon lâche le spectateur dans ce bain foisonnant, ces ruines habités, avec pour seul repère, la catastrophe passée et la musique omniprésente. On rebondit de micro récits en micro récits, converge vers des centres stratégiques, est cueilli par une séquence nocturne décalée, proche du rêve éveillé (le Grand Chief). On surnage dans cet ensemble, comme happé par une autre vague. A la nature impitoyable et la folie des hommes, la culture reprend son droit. Car la Nouvelle Orléans se distinguait ainsi : sa musique, son choc ethnique, son passé. Et si les rues ressemblent encore à un cimetière urbain, la musique s’élève au-delà des ruines, et parvient à masquer le bruit des hélicoptères survolant la ville.

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