90210

90210

L’annonce de la mise en chantier de ce spin off créa un buzz, sorte d’épiphénomène à la fois drôle et consternant, qui donna la tendance pour cette rentrée 2008, placée sous le signe des suites, adaptations ou remakes. La curiosité fut de taille. Où comment concilier le souvenir de la série originale, bien propre sur elle quand elle raconte la vie bourgeoise d’une poignée d’ados privilégiés, sans la moindre aspérité, avec ce petit côté wasp rock’n roll, aux mœurs actuelles. Le paysage a changé. Une nouvelle génération est venue damner cette pensée bien rangée. 90210, code postal de Beverly Hills, dès les premières images, stock shots frelatés des plus belles villas du coin. Pour rappeler ce contexte où l’argent s’affiche, mais bien caché derrière un portail démesuré ou une haie opaque. Et puis le lycée, West Beverly High, où Brandon et Brenda firent leurs armes, accompagnés des célèbres Kelly, Dylan, Steeve, Donna ou David. Un lieu légèrement modernisé, mais où l’on peut ressentir quelques souvenirs bien tenaces de fin de samedi après-midi passé devant la télévision.

90210 invoque autant la nouvelle génération des Gossip Girls que celle des vieux nostalgiques. Où dans un même mouvement, l’on retrouve Brenda et Kelly au Pit, servi par Nat, quand deux tables plus loin, des petites pestes mettent du Whisky dans leur Ice Tea. Autre époque, autre mœurs. La tension sexuelle est palpable en première impression, en quelques minutes on en vient au sex, drugs and… music hype (Coldplay, MGMT, pas mal, la bande son). Il semble bien loin le temps où Aaron Spelling protégeait sa fille d’une virginité déjà périmée. Ici, un des personnages principaux est crevé en flag dans sa voiture, où il se fait offrir une gâterie buccale. Parfait pour bien commencer les cours.

En un pilot, on a l’impression de voir une demi-saison condensée à l’extrême. En deux fois quarante cinq minutes, on est passé des meilleures amies aux pires ennemies, d’un couple implosé, de mini drames épiques, de pistes lancées à tout va. Comme si la série se jouait sur ces deux épisodes, comme si les auteurs craignaient une prochaine annulation. Il faut avouer que l’on n’attendait pas grand chose d’une suite de Beverly Hills. Et le pôle créatif doit être à peu près de notre avis. Rythme cocaïné, aussi futile qu’accessoire, donc forcément hyper intéressant. Hystérie passagère de petites ados en mal de sensation forte, crise familiale, jouxtes verbales incisives, tous les ingrédients sont agencés sans ordre particulier, avec l’énergie du désespoir. Et le miracle a lieu. Ou presque. Le spectacle est plaisant, jouissif par moment. La série est bien de son époque (blog inside), et le tout surfe sur la vague lancée par Gossip Girl. L’influence de cette dernière est incroyable, mais comme elle doit aussi son existence quelque part dans les circonvolutions de Beverly première du nom, on peut juger que la boucle est bouclée.

Seulement ce plaisir, comme jouissance, reste éphémère par nature. Et chassez le naturel… Retour à la case départ, dix après. Les intrigues n’ont pas changé. Tout est couru d’avance. Se pose la question de savoir si les scénaristes sont géniaux de nous soumettre au don de préscience, ou se foutent de nous pour oser raconter des histoires aussi prévisibles ? Ou alors, ils cultivent le culte de l’apparence par la plus effroyable et insupportable des façons : prouver sa vacuité par le prisme du lifting et prôner la duperie d’un tel exercice. 90210, une série qui raconte la même histoire, en plus moderne. On brasse les sempiternels mêmes clichés, comme esclave d’un cahier des charges immuable. Mais on y ajoute un soupçon d’hystérie pour épicer le tout. Les auteurs invoquent, dans ce même élan, la fibre nostalgique et les fantômes du passé. Brenda et Kelly nous font le remake du bon vieux temps. Effet Dylan oblige. On jubile devant la réouverture de traumas passés. Devant la hache de guerre déterrée. Le plaisir sera une nouvelle fois de courte durée. Justification de l’âge avec qui vient la sagesse (ou presque).

A l’issu du septième épisode, on découvre une trace de vie dans la série. Alors que jusqu’à présent, on subissait, avec défaitisme, l’électroencéphalogramme plat du show, voilà qu’elle subit, au terme de l’épisode, son premier choc. Comme un joli coup de pied dans la fourmilière. On est en présence d’un potentiel attractif pour une fois, qu’il serait dommage de ne pas profiter. Cet événement ne masque pas les énormes carences d’une écriture qui ne raconte pas grand chose et exploite sans vergogne une tradition passéiste du teen soap, mais on ne peut s’empêcher de ressentir de petits pincements au cœur devant l’élaboration d’un arc pas très audacieux en terme de développement, mais dont la conclusion affiche un joli contrepied.

Malheureusement, le plaisir est éphémère. Ade n’est pas morte, et on assiste à l’énième rédemption, parce que Beverly est porteuse d’espoir. Comme si l’on pouvait trouver un élan salvateur dans cet univers pourri par le fric. 90210, c’est le soleil, les belles villas, et l’on ne meurt jamais vraiment, surtout pas d’une OD. On rebondit, on lutte, parce que la vie est ainsi, et qu’il n’y a jamais de perdants. Autant d’abnégation et la vie deviendrait presque belle et émouvante.

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