La série, de par la qualité de ses deux premières saisons, les faiblesses de sa troisième et ce choix de changer de génération en modifiant la quasi intégralité du casting, oriente la critique vers la comparaison systématique. On dresse ainsi un miroir entre les saisons une/deux et les trois/quatre, tout en effectuant le même mouvement entre la troisième et la quatrième. D’un côté, on ne peut s’empêcher de jouer au jeu des ressemblances à cause de certains mimétismes intergénérationnels. Aligner les deux cast l’un en face de l’autre, et vous retrouverez des points communs. De l’autre, cette saison affiche des prétentions à l’opposée de la précédente et retrouve ainsi sa superbe.
Ce miroir dressé, capable de projeter un reflet fidèle et déformé, de révéler les différences et les points communs, de mettre en valeur les qualités et rappeler les erreurs, on le retrouve à l’intérieur de l’épisode lui-même. Il s’incarne entre les sœurs jumelles Katie et Emily. La première, les scénaristes l’ont étouffé sous une superficialité dévorante. La seconde bénéficie d’une attention plus nuancée, personnalité approfondie pour un résultat souvent passionnant. Katie incarnerait les dérives de cette nouvelle génération, Emily les souvenirs de la précédente. Dichotomie conceptuelle qui s’efface dans cet épisode, à l’image de ce début de saison.
On assiste à une réhabilitation des personnages. D’inscrire cette nouvelle année, sous le signe de la rédemption. Qu’elle s’incarne dans la série (la trajectoire personnelle de Cook) ou chez les scénaristes (la trajectoire « créative » de Katie). Ce travail sur le fond, sur l’écriture agit comme un remède aux dérives lourdes de la troisième saison. Et si Cook restait parfois prisonnier de ses excès, avec Katie, les auteurs réalisent le parfait volte face. Et pour donner vie à cette transformation, ils vont plonger la jeune fille dans une tourmente dramatique.
Avec Katie (plus qu’Emily et son émancipation théorique), c’est le portrait d’une famille qui saute au premier plan. On avait déjà assisté aux déboires financiers du couple, ils prennent une importance tragique dans cet épisode. Forcée de quitter leur maison (saisie), Katie assiste à la décomposition progressive du couple (parental). Un thème rapproché à la famille qui contaminera tout l’épisode. De l’annonce de sa ménopause (annihilation de son futur rapport mère/fille) aux problèmes que vivent Emily et Naomi (la rancœur de l’adultère), d’un divorce qui se profile (ses parents) à celui consommé entre sa sœur et sa mère (l’homosexualité réfutée), pour la première fois, Katie est isolée, seule, face à son monde qui s’écroule. Ce même isolement que l’on retrouvait dans le précédent épisode et qui permettait de caresser le désespoir adolescent, éjecté(e) de son propre univers, sans repère, face à des choix qui le (la) dépasse. Et c’est cet enchaînement de mauvaises nouvelles et situations difficiles qui va plonger la jeune fille dans la maturité. Cette forme de sagesse un peu naïve qui va user de sa simplicité infantile pour corriger la mauvaise trajectoire familiale.
La meilleure idée des auteurs pour réhabiliter Katie (peste pédante et égocentrique dans la précédente saison), est donc de diluer son intrigue personnelle dans une structure de groupe. Conserver l’isolation du personnage, mais l’inclure dans un cercle (familial ou amical). Scène représentative du concept : le barbecue dans le jardin de Noami. Ici sont convoquées plusieurs storylines : la crise financière du couple Fitch, la culpabilité de Naomi, la rancœur d’Emily. Ce qui s’annonçait comme une fête se transforme en exutoire. Climax rythmé aux délires autodestructeurs d’Emily sous emprise de drogues. Dans ce capharnaüm, Katie devient le temps d’une gifle, la mère (biologique) qu’elle ne sera jamais. Dans cette scène, elle remplace sa propre mère, paralysée d’effroi, et raisonne ainsi sa sœur. Cette scène s’inscrit en reflet à la séquence de la boîte de nuit. Deux actes physiques (ou « violents »), chacun à l’opposé d’un spectre émotionnel : l’amour (fraternel, symbolisant la maturité) et la colère (vexation, jalousie, symbolisant la puérilité). Le travail théorique autour de Katie s’inscrit ainsi dans la dramaturgie de la série (nourri par son contexte), et permet une évolution majeure du personnage.
On retrouve dans cet épisode tous les ingrédients qui ont constitués la réussite passée de la série. Le choc violent des émotions adolescentes, son incompréhension du monde adulte, ses excès et la construction d’une personnalité mature. Des séquences intimistes, esquissées au tracé fragile, d’autres plus agressives et tourmentées, représentation frontale d’un mal-être, équilibre parfait pour un portrait saisi sur le vif, en construction permanente. Katie devient un objet fragile, une représentation plus réaliste de l’adolescente au caractère bien trempé, dont la couche inférieure, à vif, marque l’insécurité existentiel qui sourd en chacun d’eux. Au fil de l’épisode, la sœur d’Emily tombe les accessoires, l’esprit fashion qui modelait sa personnalité. Elle est nue face à Thomas, lors d’une conversation introspective, et en jean, t-shirt, non maquillée, lors de la réunion familiale. Un retour au naturel, à la simplicité, pour une jeune fille qui vient peut-être de prendre conscience de sa propre vulnérabilité (émotionnelle et physique) et la vacuité d’un rêve de petite fille.
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