Si le petit monde de la sitcom aujourd’hui n’offre plus d’expérimentations, se contentant de recettes plus ou moins vielles ou récentes (le multi-caméra contre celle libérée), on y trouve une satisfaction mesurée, capable de combler ou non nos attentes. En cette rentrée 2009/2010, Modern Family sort vainqueur, The Middle intrigue, quand Community s’effondre dès le second épisode et Cougar Town affiche une vulgarité rédhibitoire. Un constat un peu amer, manquant de bonnes idées ou de bonnes réalisations. Hank ajoute une pierre à l’édifice en parvenant à proposer tout ce qu’il se fait de pire dans les sitcoms américaines.
Hank Pryor, CEO d’une grosse compagnie frappée par la Crise financière est démis de ses fonctions. Conséquences douloureuses pour lui et sa famille qui doivent déménager de New York pour un bled paumé de Virginie.
La réactivité est une qualité que l’on n’enlèvera pas aux scénaristes américains. Trouvant dans l’actualité (très) récente une source pour l’élaboration d’épisodes ou de séries. Le champion à ce niveau était David E. Kelley dans Boston Legal, surfant sur les faits de société qui parcouraient les unes des journaux pour alimenter ses idées. La Crise financière n’a pas tardé à trouver place dans la fiction télévisuelle. Hung est probablement la première série bâtie sur ce fait et Glee dans un univers similaire (le lycée) reprend le flambeau. Sans compter les mentions faites dans de nombreux autres shows qui seraient trop long à énumérer. Ce contexte, dans un univers volontairement comique, pouvait donner lieu à une (re)lecture satirique du capitalisme et sa défection ( ?) après des années d’irresponsabilités nourries pas l’appât du gain. Un sujet en or, qui appuie là où cela fait mal.
Hélas, rien de tout cela n’apparaît dans ce pilot. Se trouve convoqués tous les stigmates de la mauvaise sitcom « à papa », appuyé par une vision presque « idéalisée » de la crise, prétexte au retour aux sources et célébration de la famille. Hank n’offre aucune seconde lecture sur ses thèmes (conséquences de la Crise, paternité des CEO,…). Tout est abordé selon un angle unique, privilégiant un humour faisandé, épicé de mauvais rires enregistrés et d’un décor qui n’a dû coûter grand-chose. Si le contexte n’était pas la Crise, on jurerait la série sortie tout droit des 60’s. Résultat catastrophique dont on imagine la durée de vie très limitée.
Alors que dans la sitcom classique, les auteurs ont appris à injecter des idées modernes (les geeks de The Big Bang Theory, la narration « lostienne » de How I Met Your Mother), Hank affiche un retour aux idées basiques qui fleurent bon l’esprit un brin réac, aux enjeux comiques inexistants et à l’humour lourd, pataud, poussif et prémâché. Détail amusant, Hank était déjà le nom d’une sitcom des 60’s (l’histoire d’un jeune homme se faisant passé pour un autre étudiant parce qu’il ne pouvait payer les frais de scolarité). Il semblerait que ce Hank des années 2000, n’ait pas piqué que le nom de son personnage principal, mais également l’esprit de sa conception pour un résultat has been…
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J’aurais pu en pleurer tellement ton premier paragraphe est clairvoyant (bien que je me refuse à dire que TBBT ou HIMYM seraient plus originaux de quelque façon que ce soit). La rentrée est très pauvre sur le front des comédies… par contre je m’insurge, on est loin du sitcom des années 60. Des Bewitched ou I Dream of Jeannie étaient largement plus emprunts de malice et de tendresse que ce calamiteux Hank. Voilà où ça mène de truander le système universitaire américain !
Quand je compare Hank à une sitcom des années 60, c’est pour l’image que donne la série sur sa fabrication. Aujourd’hui, on ne peut plus faire de sitcom ainsi sans injecter une quelconque nuance de modernité. Sans être un inconditionnel de Bewitched ou I dream of Jeannie, je reconnais qu’elles possèdent toutes deux un vrai charme qui rend leur vision sympathique (chose que l’on ne ressent jamais dans Hank), mais d’un point de vue technique, ce sont bien deux sitcoms de leur époque, et voir, dans les années 2000, cette fabrication reproduite (cadence et nature des blagues/rires enregistrés, humour burlesque,…), cela fait mal aux yeux.
Concernant TBBT, c’est la présence de geeks en personnages principaux qui rend la sitcom moderne, de même que la narration éclatée (récit gigogne, flash-forward, flash-back, multinarration d’une même scène) de HIMYM (après, réussites ou non, c’est à l’appréciation de chacun). Elles tirent leur originalité d’une particularité, même si d’ordre générale, elles restent toutes deux des sitcoms traditionnelles (contrairement à du Curb Your Enthusiasm, Arrested Developpement ou The Office).